mercredi 20 juillet 2016

Mercredi 20 juillet 2016 - Les Amérindiens

Choix et retraitement des données anciennes

Les données les plus anciennes, issues des colonisateurs, conquérants ou missionnaires, et revues par des démographes, étaient non seulement incomplètes, mais aussi manipulées dans un objectif idéologique, afin de défendre une version plus acceptable ou au contraire moins acceptable de la colonisation ; selon l'historienne Élise Marienstras, la « démographie a été utilisée, manipulée même, au service d'une certaine conception de la colonisation »1.

Définition d'un amérindien

Thornton relève qu'aux États-Unis, il peut exister six façons différentes d'être déclaré amérindien :
  • appartenance à une tribu indienne
  • auto-déclaration, comme dans le cas du recensement
  • reconnaissance par la communauté indienne, typiquement par d'autres Indiens
  • reconnaissance par des non-Indiens
  • définitions biologiques telles que le nombre d'ascendants
  • définitions culturelles (« agir comme un Indien devrait »)2.
S'il trouve la seconde méthode, auto-déclarative, la plus respectueuse vis-à-vis des Indiens, celle-ci pose toutefois quelques problèmes. Ainsi, dans « Les autochtones invisibles ou comment l’Argentine s’est « blanchie » », Sabine Kradolfer s'étonne que la communauté autochtone ait été déclarée quasiment disparue vers 1995, puis qu'en 2005, un journal titre « 56 % des Argentins ont des ancêtres autochtones ». Cela témoignerait d'un « phénomène d’« émergence indigène » sur tout le continent latino-américain qui a conduit à la (ré)apparition de différents groupes ethniques sur la scène politique. En Argentine, certains peuples semblent renaître comme par exemple les Huarpe, les Ona ou les Quilmes, alors que les Mapuches qui ont toujours été reconnus comme l’un des groupes ethniques les plus importants du pays n’ont jamais été aussi nombreux à revendiquer leur passé autochtone »3. Le cas de la renaissance des Ona - aussi appelés Selknam, une tribu exterminée à l'aube du XXe siècle - est d'autant plus symptomatique que la mort de la dernière des Selknam a été annoncée en 19994.

Époque précolombienne

L'évaluation repose sur des données archéologiques et sur les témoignages et mémoires des conquistadors et ecclésiastiques. Les Incas procédaient à des recensements périodiques des populations, mais les quipus conservés ne sont pas décryptables. Le document le plus intéressant pour le Mexique est le Codex Mendoza, rédigé en 1549, et qui donne la liste des tributs versés à l'empereur des Aztèques en 1519. L'absence de données fiables a conduit à des estimations plus ou moins fantaisistes.
Thomas Calvo, spécialiste de l'Amérique hispanique donne les chiffres suivants5 :
  • Empire aztèque et ses marges : 17,5 millions d'habitants, dont :
    • territoires du Nord : 2,5 millions
    • Mexique central : 15 millions
    • Chiapas : 0,8 million
  • Amérique centrale : 4,2 millions d'habitants, dont :
    • Salvador : 0,4 million
  • Amérique du Sud :
  • Empire inca: 12 millions d'habitants, dont :
    • Sierra de Quito : 1 million
    • Pérou : 9 millions
    • Haut-Pérou (Bolivie) : 0,3 million
  • Amazonie (Brésil) : 4 millions d'habitants
  • Caraïbes : 5 millions d'habitants
  • Araucans : 1 million d'habitants
  • Peuples à la périphérie des grandes civilisations : 4 millions d'habitants, dont :
Pour Pierre Chaunu6, « les résultats de Borah et Cook conduisent à une révision complète de notre représentation de l'histoire américaine. Ce n'est plus 40 millions d'hommes jugés excessifs du docteur Rivet qu'il faut supposer à l’Amérique précolombienne, mais 80 à 100 millions d’âmes peut être ». Les études auxqelles P. Chaunu fait référence sont celles de Sherburne F. Cook et Woodrow W. Borah, démographes de l'école de Berkeley7.
Pierre Clastres donne pour les seuls indiens Guarani en 1539 une population de 1,5 million d'habitants au minimum.

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